«N’échappant pas à mon humanité, les premières années de mon travail furent marquées par un besoin impératif de sens qui se traduisit par des sculptures d’ordre symbolique et anthropomorphique, illustrant cette quête et la découverte progressive du sens spirituel de l’homme.
Au fil de la réponse peu à peu captée, la question fit place au chant et aujourd’hui je travaille la sculpture jusqu’à ce qu’elle contente en profondeur ce désir qui m’anime, d’un rayonnement silencieux d’harmonie, de pureté, de Présence, tel qu’on peut le ressentir devant la nature ou dans le recueillement.
Cela donne des formes aussi simples, en soi aussi abstraites que figuratives, comme une pierre, un rocher, un bloc, une bûche ou un parallélépipède. Pour traduire ce sentiment de sacré, cette vibration d’éternité ressentie devant la Création, j’utilise la forme et la matière telles que données par la nature, les travaillant pour en faire ressortir toute la beauté et l’être, en même temps qu’effaçant toute trace de travail par des techniques comme le sablage ou le feu, qui rendent à la matière sa texture originelle. Dans une fragilité exposée, je tente en effet de ne pas « faire » des sculptures, des objets d’art fabriqués, catalogués comme tels, mais de laisser passer à travers moi cette beauté existante, animée, de la Création. C’est une affaire d’âme et de communion, de désir.
Depuis peu, je vois à nouveau mon travail évoluer. Après ce temps où j’humanisais – digérais - la Création, la laissant le plus possible s’exprimer à travers moi, en une sorte de culte où les formes les plus naturelles sont comme autant de louanges en écho à la nature, et les plus compactes, dépouillées, géométriques comme autant d’hommages à la Présence émanant de ce qui est, après ce temps où je demeurais en un retrait émerveillé derrière la Création, je commence de plus en plus à former «moi-même» les sculptures, sans crainte d’intervenir dans les aspects naturels de la matière abordée, pour moduler mon propre chant,exprimer mon propre émoi.
Au fond,c’est maintenant la sculpture qui fait de moi un sculpteur, la Création qui à son tour m’humanise et vient libérer mon propre chant, l’âme enfin rassurée. » Geoffroy de Montpellier