Judith Avenel est née en 1972 à Bordeaux. De sa traversée du Sahara à l’âge de seize ans et de ses nombreux séjours en Afrique de l’Ouest, l’artiste restera fortement marquée par des préoccupations d’altérité et d’identité. Pendant sa formation à l’école des Beaux-arts de Bordeaux, elle sera sélectionnée à un atelier d’été dirigé par Thierry de Duve - expérience historique pour les écoles d'art en France - puis à un séjour de recherches à Abidjan. Ces expériences décisives marqueront un des fondements de son travail mêlant sculpture, installation sculpturale, photographie et vidéographie. Après avoir passé plusieurs années à dispenser des enseignements artistiques, pratiques et théoriques et avoir effectué de multiples résidences artistiques en France et au Burkina Faso, elle décide d’écrire une thèse sur son travail artistique : "Si tu meurs je te tue". Temps, absence et mémoire. Elle présentera et publiera son travail dans différents colloques et ouvrages collectifs. Elle a participé à de nombreuses expositions individuelles et collectives dont en particulier : La Belle et la Bête, Regards Croisés sur la Beauté, Institut Culturel Bernard Magrez, Temps, absence et mémoire. Un memento mori, La Nouvelle Galerie, Humain, trop humain, 2ème Biennale de sculpture Novart.

« Judith Avenel (…) est une artiste aux prises avec une matière complexe, imbriquée, interférée (…). Une artiste anti-conceptuelle. L'inquiétude, chez elle, est un moteur puissant. Son art (…) veut inscrire le corps dans le temps, valider que le temps sera ou tard perdu et que l'œuvre (…) en est une mémoire (…), comme en un à-rebours perpétuel »

Paul Ardenne.

Les 6 œuvres présentées ici Sans visage, La rose de personne, Don't forget me, Chance (Fortuna), Si tu meurs je te tue II, Ex-voto font partie d’un ensemble de pièces regroupé sous le titre générique Gardez les yeux ouverts.

Toutes révèlent un regard mélancolique posé sur une pensée du temps qui ne me quitte pas. Elles sont l’espace d’un récit poétique qui s’érige sur la perte, s’articule dans des questionnements apeurés de la mort. Elles consacrent à la fois la mémoire et l’oubli, accueillent cette présence absente, fixent ce qui déjà échappe, déjà s’échappe. Comme suaires, comme fantômes d’air et de terre, comme des ectoplasmes de formes disparues, les œuvres dépeignent la disparition et la présentifient, révèlent une dimension de spectralité. Elles pointent le lien dialectiquement noué de la vie dans la mort, d’une promesse de l’œuvre, de l’œuvrer à venir qui (nous) maintient en vie.

Mon travail est un interminable baiser protecteur donné à ces figures – des fantômes – qui m’habitent, me hantent parfois, me traversent, passent, partent et reviennent. Prendre soin d’elles, d’eux.

Gardez les yeux ouverts c’est affirmer la vie. L’affirmer simplement, essentiellement.

Judith Avenel (février 2023)